A retenir.

Les chatbots sont le sujet tendance de 2017.
Mais les internautes en veulent-ils réellement…
…et votre stratégie digitale a-t-elle vraiment besoin d’eux ?

8mn de lecturePartout ! Les Chatbots sont partout ! Si seules 5% des grandes entreprises françaises ont déployé un Chatbot [1] depuis les annonces de Facebook il y a un an, la technologie n’en finit pas de faire parler d’elle. Bonnes pratiques, remplacement des opérateurs humains… les prédictions vont bon train, on s’en est même déjà fait l’écho sur ce blog [2]. Pourtant, soyons honnête : Votre stratégie digitale n’a pas besoin d’un Chatbot !

R.I.P. Bender. Tu n’étais pas si utile que ça, finalement.

Un chatbot, c’est quoi ?

Mais derrière la folie des chatbots, qu’est-ce qui se cache réellement ? On ne va pas refaire ici l’histoire de l’intelligence artificielle, d’autant que les chatbots ont finalement assez peu à voir avec elle…

Annoncés par Facebook lors de la conférence F8 en avril 2016 [3], les chatbots sont de mini-programmes informatiques capables de répondre de façon autonome à des demandes simples des internautes. Ils entrent dans la longue lignée des agents conversationnels [4], c’est-à-dire de programmes capables de repérer des mots-clés dans une requête et de répondre à celle-ci en conséquence, sans forcément prendre en compte un contexte de conversation, un historique ou un sens plus étendu dans les phrases reçues. Pas d’intelligence donc, juste des enchaînements logiques.

La force des chatbots, en tout cas de ceux proposés par Facebook depuis bientôt un an, tient plus à leur environnement qu’à leurs capacités propres. Tout d’abord, ils évoluent sur le terreau fertile de l’écosystème Facebook et interagissent principalement via l’interface Messenger. Ce système de messagerie, héritier de la messagerie interne de Facebook, est devenu en peu de temps l’une des interfaces de conversation la plus populaire du Web. C’est la première plateforme d’échange entre internautes en France et la seconde au Royaume-Uni [5]. Messenger a franchi le cap du milliard d’utilisateurs dans le monde en milieu d’année dernière [6], devançant de loin Whatsapp et n’ayant que les chinois de Wechat comme véritables concurrents planétaires.

La technologie chatbot offre aussi l’avantage d’évoluer dans un écosystème totalement ouvert. Non seulement, Facebook a laissé à tous la possibilité technique de programmer son propre robot de conversation, mais il accueille également volontiers les connexions avec les API d’autres plateformes. De nombreux acteurs digitaux se sont lancés dans leurs propres projets d’outils à base de Chatbot, dont Uber [7] pour la réservation de voiture (avant même les annonces du F8 pour être honnête), KLM pour l’enregistrement rapide de son vol [8], Voyages-SNCF pour la réservation de billets de train [9]… Les développements sont nombreux et l’intégration depuis l’automne dernier des interfaces de paiement [10] laisse présager un futur du M-Commerce très orienté autour de la conversation.

Que veulent réellement les internautes ?

Bref, un monde de chatbots est en cours de déploiement et tout cela s’annonce fabuleux ! En juillet dernier, on comptait 11 000 robots de conversation en ligne [11]. Peu de chiffres officiels circulent, mais on peut tabler sur une croissance débridée tant la mode a pris en fin d’année dernière, et tant les agents conversationnels sont identifiés par beaucoup comme LA tendance forte de 2017. Mais, les internautes sont-ils réellement prêts pour un usage massif de ces nouveaux robots ?



Ce qui est certain, c’est que les Internautes sont en recherche d’assistance sur Internet. Ils seraient 83% à apprécier une aide lors d’un achat en ligne [12], ne serait-ce que pour trouver une information complémentaire sur le produit qu’ils sont en train d’ajouter à leur panier. Ces mêmes internautes plébiscitent en priorité les interfaces de Messagerie comme canal privilégié de la relation client : 62% d’entre eux estiment que ces applications sont la première ou la seconde méthode qu’ils utiliseraient pour joindre un service client [13].
Sur le terrain du service après-vente, les chats ont d’ailleurs définitivement détrôné les réseaux sociaux qui semblaient un temps la solution miracle. Aujourd’hui, seuls 2% des internautes estiment que Twitter est un canal pertinent pour joindre une marque. Et encore, sur la somme de ces marginaux, 29% estiment qu’ils « parlent dans le vide » sur Twitter et qu’ils se plaignent sans que les marques ne réagissent.



Mais se tourner vers une application de messagerie veut-il pour autant dire s’adresser à un robot ? La curiosité des consommateurs semble bien là : 86% des millenials (âgés de 18 à 34 ans) estiment que les marques doivent posséder un chatbot pour promouvoir leurs produits [14], mais 58% d’entre eux seulement ont déjà testé une conversation avec un robot. La pertinence semble plus problématique à obtenir : 54% de ces millenials ayant testé les chatbots estiment que la compréhension de leur requête représente le plus gros défi du robot. 28% aimeraient que les chatbots aient un comportement plus humain… et 12% aimeraient que quand un chatbot ne comprend pas une requête, le service client prenne le relais par téléphone.

Hype. Fail. Next ?

Sur quelques secteurs toutefois, les chatbots sont plébiscités. Une étude révèle ainsi que dans le domaine des placements financiers, 73% des investisseurs feraient sans doute plus confiance à un robot-conseiller qu’à un humain [15]. Mais c’est ici l’objectivité de traitement des données qui est en cause, plutôt que la fiabilité de la relation.

Au-delà de la hype qui entoure actuellement l’intelligence artificielle et les robots, difficile quand même d’identifier un engouement clair de la part des Internautes pour les agents de conversation. Que ceux-ci veulent des marques et des services clients plus accessibles, c’est indéniable. Qu’ils désirent également plus de pertinence dans les réponses des marques, c’est également indiscutable… On ne discutera pas de la supériorité du robot dans le domaine de l’accessibilité. Un robot ne dort pas, ne fait pas de pause-déjeuner, et est donc accessible 24/24h et 7/7j pour répondre aux demandes des clients. Il répond également plus rapidement à une requête et peut gérer plusieurs dossiers de front sans problème.



Pour ce qui est de la pertinence, c’est une autre paire de manche… On estime que depuis le lancement des plateformes de chatbots de Facebook, seules 30% des demandes formulées par les internautes ont été réellement comprises et adressées par les différents robots mis en place [14]. Cela est bien entendu dû à la capacité technologique actuelle des robots : tous les développements des 10 derniers mois n’ont pas été fait avec une idée d’intelligence artificielle poussée en tête. Les messages formulés par les internautes doivent également y être pour quelque chose. Attrait de la nouveauté oblige, de nombreux consommateurs ont utilisés des chatbots pour simplement tester leurs capacités de réponses et les pousser dans leurs retranchements. Jurons, phrases sans significations réelles doivent faire parties de ces 70% de requêtes non comprises… Saviez-vous au passage qu’on estime que 2,5% des utilisateurs de chatbots ont déjà envoyé une photo d’eux nu à un robot [16] ? Quelle pertinence face à ce type de contenu ?

Vous avez besoin de dialogue !

Mettez maintenant en vis-à-vis l’engouement médiatique autour des chatbots et la quête de pertinence des consommateurs. Et posez-vous la question : Avez-vous réellement besoin d’un chatbot dans le socle de votre stratégie digitale ? En fait, il faut prendre de la hauteur pour répondre à cette question…



Vous n’avez pas besoin d’un chatbot, vous avez en fait besoin d’une stratégie de dialogue. Les interfaces de messagerie sont bel et bien plébiscitées par les internautes, il apparaît donc évident que les marques doivent y être présentes… Mais pas forcément de manière automatisée. Pour enfoncer le clou avec un dernier chiffre, 80% des internautes américains veulent parler à « quelqu’un » quand ils s’adressent à un service client , et seuls 12% souhaitent éviter un contact humain à tout prix [17].

Vous avez besoin d’être présent sur les interfaces messagerie, mais de façon pertinente : en apportant la meilleure réponse possible aux demandes des internautes, en comprenant leurs besoins et en prenant en compte aussi souvent que possible leur historique [18]. Si le chatbot que vous envisagez n’est pas capable de fournir suffisamment de pertinence à vos clients, alors vous n’avez peut-être pas besoin de lui, mais plutôt d’une équipe humaine prenant en charge les conversations avec votre communauté.

Bien entendu un chatbot peut répondre à certaines requêtes de manière automatisée. Il peut également filtrer certaines demandes via des questions simples et réorienter les internautes vers des ressources documentaires… Mais restons lucides, la portée des chatbot se limite aujourd’hui bien souvent à un usage tactique, utile mais tactique, déployé dans le cadre d’une stratégie globale de dialogue digital. Le chatbot peut-être un avantage opérationnel indéniable dans la façon de qualifier et de renforcer vos échanges avec les clients. Ce n’est en aucun cas le cœur de votre stratégie de relation client !

Du moins, jusqu’à ce que l’intelligence artificielle ne nous rattrape !

Pour s’Inspirer

– Un album : Ghost in the Machine (The Police – 1981)
– Un film : Wall-E (Andrew Stanton – 2008)

Sources à Lire
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1 réponse
  1. JPT
    JPT dit :

    La perception de la qualité par l’utilisateur est fondamentale pour une stratégie digitale (j’en parle un peu ici: http://jeanphilippetimsit.fr/). La multiplication des chat bot, imprécis et bien souvent gadgets, comme vous l’expliquez si bien, conduit à une baisse de cette perception de la qualité. Ce n’est pas un bon moyen de construire un avantage concurrentiel.

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