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Le numérique n’a pas fait de pause pendant l’été. Et pour cette rentrée 2023, les agences digitales et les directions digitales vont être confrontées à de nouveaux sujets de réflexion.

Nouveaux ? Pas vraiment… Les grands questionnements de cette nouvelle année bourgeonnent finalement depuis quelques mois, voire quelques années. Mais l’été en a rendu certains plus importants, voire pressants, que d’autres. Et les actualités de ces mois de juillet et d’août vont peut-être mener à une réorientation des stratégies de certaines marques.

Passage en revue de trois enjeux que toute entreprise devra prendre en compte dans les mois qui viennent.

La place de l’IA dans la création numérique

Le sujet n’est pas nouveau, et s’il fait moins la une des magazines professionnels, il reste dans toutes les têtes. L’intelligence artificielle, ou plutôt les modèles génératifs comme ChatGPT et Midjourney, continue de faire couler beaucoup d’encre. Mais la phase d’étonnement semble désormais passée. Sur les réseaux sociaux, les messages impressionnés par les capacités des algorithmes se font de plus en plus rares. Et les quelques cases créatifs présentés lors du Festival international de la créativité de Cannes – les fameux Lions – n’ont finalement pas raflé la mise.
On est donc très logiquement passé à l’étape suivante : l’intégration business.

Ainsi, les outils génératifs sont en train d’envahir notre quotidien bureautique, numérique et créatif. Adobe a présenté au printemps Firefly, son moteur d’intelligence artificielle intégré à Photoshop. Google continue lui à tester BARD – son interface de dialogue intelligente devant concurrencer ChatGPT – et commence à déployer sa génération suivante d’intelligence artificielle : PaLM2. Les plateformes se multiplient ainsi, et les grands groupes, tel Microsoft, continuent d’annoncer l’intégration d’IA à leurs produits et suite logicielle.

Devant la pléthore de produits et d’offres IA, la question pour l’industrie créative devient plus humaine que technologique : comment intégrer l’IA dans son écosystème économique ? Remplacer des ressources déjà précaires ? Faire évoluer ses prestations, et forcément leur tarification ? Refuser l’intrusion trop forte des algorithmes dans le monde de l’imagination ? Les prochains modèles génératifs aideront peut-être à trancher. Des rumeurs font en effet état d’une nouvelle version de ChatGTP moins performante que ses ainées, rendu confuse et imprécise par le trop de données qui lui était confiées. L’intelligence artificielle aurait-elle ses limites ?

L’éclatement des réseaux sociaux

C’est l’autre grand chamboulement de cette rentrée, même si ses prémisses datent d’il y a plus d’un an. À la suite du rachat de Twitter par Elon Musk en novembre dernier, l’ensemble des plateformes sociales qui dominaient le Net depuis une bonne dizaine d’années semblent chacun chercher leur nouveau souffle.

Twitter s’épuise. Tantôt raillé, tantôt critiqué, le réseau a coup sur coup limité ses services – le non-accès des Tweets aux non-abonnés – modifié son algorithme, changé de nom (appelez-le désormais X)… et semble de moins en moins crédible en tant que réseau social grand public. Si l’algorithme publicitaire semble bien plus généreux qu’avant, il n’est pas certain que les annonceurs se ruent encore sur les posts sponsorisés. De nombreux utilisateurs se font d’ailleurs discrets tant les messages et les prises de positions y deviennent clivants.

La guerre de succession est donc ouverte. Mastodon, son architecture décentralisée et son système d’instance, ne séduiront sans doute pas le grand public. Ce n’est d’ailleurs pas leur objectif. Et les premiers retours concernant Threads – réseau développé à la hussarde et intégré à l’écosystème Facebook – ne semblent pas probants : problème de confidentialité des données, utilisateurs fantômes… et surtout interdiction temporaire du réseau au sein de l’Union Européenne en raison de sa trop grande capacité à aspirer les données des utilisateurs.

Reste à savoir si toutes ces péripéties ne sont que les étapes préparatoires à l’émergence d’un nouveau grand réseau social populaire (peut-être TikTok ?), ou sont les derniers soubresauts d’un modèle – le Web social se voulant universel… et publicitaire – moribond.

L’impact écologique du numérique

La dernière tendance prêtera sans doute moins à sourire. La question de l’impact écologique du numérique n’a jamais été aussi urgente. On sait que la plus grande partie de la pollution, et de l’impact carbone lié au numérique est d’abord le fait de la fabrication des terminaux. Extraction des métaux rares, usinage, transport depuis les pays asiatiques jusqu’en Europe et aux USA, le bilan écologique de nos appareils est énorme, et les règles d’obsolescence édictées par certains acteurs – dont Google qui interdit les mises à jour d’application sur des OS trop anciens – doivent clairement être questionnées pour réduire celui-ci.

Mais cet été, face à la sécheresse faisant rage dans de nombreux pays européens, d’autres questions méritent d’être soulevées. Le développement de plusieurs projets de Datacenters, en Espagne notamment, pose clairement la question de l’accès à l’eau et des priorités de celui-ci : cette ressource commune doit-elle servir à l’alimentation des populations, à l’irrigation des cultures ou au refroidissement des machines stockant nos données ? Les crises hydriques vont sans doute se multiplier dans les années à venir. Elles vont rendre plus grave encore la responsabilité des entreprises dans leurs choix technologiques : peut-on solliciter des partenaires dont les installations s’établissent là où l’accès à l’eau est déjà tendu ?

Et d’une manière plus générale, l’ensemble de nos développements numériques – passés et à venir – sont-ils toujours nécessaires ? Une question qu’il semble important que dirigeants et agences se posent, dès cette rentrée.

Dans une année 2020 riche en évènements et en rebondissements, une question se fait de plus en plus saillante : celle de la construction d’un « Numérique positif ».

Le Net a envahi notre quotidien, mais il doit encore évoluer pour devenir plus utile, mais aussi plus responsable.

De terrain de jeu pour geeks, Internet est devenu incontournable dans nos vies. Mais, alors qu’il y a 20 ans on se félicitait de l’ère d’ouverture culturelle et de partage qu’il allait provoquer, on l’accuse aujourd’hui de nous surveiller, travestir la vérité et de manipuler l’opinion.

Les technologies ont évolué à grande vitesse mais le Net pourtant n’a pas changé. Si on est passé du mail au snap, de la page Web à la story… les possibilités de rencontre, de partage, de découverte restent là, portées par des internautes friands de contacts et d’interactions.

Aujourd’hui comme hier, les outils digitaux rapprochent les utilisateurs, facilitent l’accès à la connaissance, améliorent l’expérience – et parfois la vie – des humains. Le monde connecté n’est peut-être pas féerique, mais il est loin d’être l’obscure dystopie qu’on dépeint souvent.

En 2020, les agences digitales doivent, plus que jamais, remettre à l’honneur un Digital utile et responsable, tout en gardant à l’esprit son impact sur les utilisateurs et sur la planète.

Avec leurs clients, elles peuvent développer des services réellement utiles aux internautes, citoyens, consommateurs ou collaborateurs. Elles doivent accompagner ces mêmes clients dans la maîtrise des enjeux du monde digital, l’appréhension de ses dimensions environnementale et sociétale, et l’identification de ses dérives possibles.

Être agence digitale en 2020, ce n’est plus seulement faire, c’est surtout faire grandir.

Aujourd’hui une agence digitale doit accompagner les marques pour une réelle démarche RSE intégrée : dématérialiser, mais aussi penser à la fin de vie des outils et des campagnes, aux données stockées sans raison ou aux sites qui ne sont plus visités. Se poser la question des bénéfices à long terme du remplacement de catalogues par des sites qui fonctionnent H24, pour des exploitations souvent ponctuelles. S’interroger sur les impacts et bilans carbone de ces outils, que peu considèrent aujourd’hui.

Une agence digitale, plus qu’aucune autre, doit questionner l’expérience client globale et créer des connexions utiles, fluidifier les démarches. Où est la priorité aujourd’hui : déposer 40 cookies sur son site marchand ou gérer au mieux les files d’attente ?

Une agence digitale doit accompagner la mise en oeuvre, mais surtout conseiller la stratégie de moyens. Plutôt qu’une nouvelle expérience de réalité virtuelle, n’est-il pas plus responsable d’investir dans une application de formation à la sécurité ? Et mieux servir l’engagement responsable de la marque et au final son image et ses ventes ?

Au-delà de leur expertise technique, les agences digitales doivent être des partenaires humains et responsables, et être aux premiers rangs pour construire un digital bénéfique pour tous.