Cela fait bien longtemps que les problématiques de design et d’expérience utilisateur ne se cantonnent plus aux seuls sites Web. Pour suivre le consommateur sur le Net, il faut désormais penser Parcours digitaux, et imaginer les interactions d’un client avec l’ensemble des points de contacts que propose une marque. La Customer Experience, c’est aujourd’hui une histoire clairement multicanale !

Quand les internautes gagnent en maturité

Rien d’extrêmement nouveau pourtant dans les usages. Le constat est fait depuis longtemps : les outils digitaux ont très clairement redonné le pouvoir aux consommateurs en leur fournissant des sources d’information quasiment infinies sur les produits et services. L’industrie du voyage, par exemple, en aura tout particulièrement fait les frais. Devant la soif d’information et de réassurance des clients, les hôtels ont perdu la main et cédé le terrain à des intermédiaires plus à même de fournir une information précise et éclairée aux futurs voyageurs : Booking, Tripadvisor et autres Online Travel Agency (OTA). Une intermédiation qu’on qualifierait aujourd’hui d’Uberisation et qui revient à reconnaître l’indépendance grandissante du consommateur sur le Web.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Dans une étude publiée récemment par Oracle et portant sur l’avenir de la relation client, on apprend que 94% des consommateurs ne se sentiraient pas affectés si les « marques » disparaissaient… Preuve, s’il en est besoin, que l’on est bien passé d’une ère de la communication – descendante, d’une marque au consommateur – à une ère de l’information et du service dans laquelle le client cherche avant tout un impact direct sur sa vie.

Dans cette même étude, quand on aborde le ressenti des décideurs d’entreprise à travers le monde, on apprend également que pour 48% d’entre eux, les technologies digitales et mobile ont eu un impact sans précédent sur le comportement de leurs clients. 40% des décideurs estiment que les consommateurs sont maintenant plus indépendants et mieux informés et 1/3 admettent que les clients préfèrent effectuer leurs démarches par eux-mêmes plutôt que de demander l’assistance d‘un conseiller ou d’une marque.

Une véritable prise de pouvoir donc, aussi bien dans la recherche d’informations nécessaires à l’achat, que dans l’acte d’achat lui-même.

Une expérience globale

Dans le même temps, l’interaction entre le client et les marques – ou simplement les prestataires – s’est largement globalisée. Il est loin le temps où les interactions entre une marque et un consommateur se limitaient à la consultation d’un catalogue en ligne et à la commande d’un produit. L’internaute a multiplié ses entrées dans l’univers digital, et des plateformes intermédiaires se sont développées rapidement : Google est visité par 40 millions d’internautes français chaque mois, Facebook lui cumule 14 millions d’internautes français mensuel sur ordinateur (données Médiamétrie). Des réseaux qui sont devenus autant de points névralgiques de la relation entre une marque et ses clients potentiels.

Dans le même temps, le mobile a également révolutionné la façon dont les consommateurs utilisent les plateformes digitales. Google l’annonce dans ses études : non seulement nous interagissons avec notre smartphone plus de 150 fois par jour, mais surtout depuis le début de l’année, plus d’une recherche sur deux est faite à partir d’un terminal mobile. Terminal sur lequel les réseaux sociaux règnent en maîtres (Facebook avec 31 millions de visiteurs uniques en France en août 2016, Twitter avec 13,5 millions, Instagram avec 11,9 millions ou Snapchat avec 10 millions… toujours selon Médiamétrie). Nouveau terminal, et donc nouveaux usages.

L’expérience Google Glass de Voyages-SNCF, un exemple de multiplication des points de contact.

Pour finir le paysage, on n’oubliera l’explosion des messageries instantanées depuis 2014 (Snapchat, Whatsapp, Messenger…), l’émergence de l’intelligence artificielle et des chatbots, l’arrivée annoncée d’une réalité virtuelle et/ou augmentée accessible à tous… et le fait que les usages d’avant l’ère digitale n’aient toujours pas disparus : le catalogue papier existe toujours, les courriers et surtout téléphone sont toujours utilisés pour des interactions rapides ou des opérations qui demandent une réassurance humaine importante. Et la boutique physique est en train de se réinventer.

Le « tout digital » n’est qu’une chimère et la Transformation digitale a surtout contribué à donner le choix au consommateur dans les moyens d’interaction qu’il peut utiliser. Une véritable démultiplication des supports.

La nécessité de construire une Experience Map

Mais comment les marques peuvent-elles faire face à cette effervescence de points de contact ? Si la plupart dans grands acteurs de la consommation grand public ont appréhendé les réseaux sociaux, il reste de nombreux terrains à explorer. D’après l’étude Oracle citée plus haut, 44% des entreprises entendent explorer l’utilisation de la Réalité Virtuelle dans leur relation client d’ici à 2020. Les chiffres sont les mêmes pour le déploiement de Robots ou de Chatbots et descendent à peine à 41% quand on parle d’intelligence artificielle. La volonté, ou plutôt la nécessité, d’investir et donc là.

Pour autant, il convient de ne pas investir de manière erratique. La méthode pour appréhender ces nouveaux leviers d’interaction avec les consommateurs, et surtout leur logique dans l’expérience du consommateur passe par la modélisation de véritables parcours de clientèle prenant en compte l’ensemble des canaux possibles. On parlera volontiers d’Experience Map :

Experience Map : comprendre les grandes étapes et les points de contact avec un client, et surtout trouver des réponses !

La méthode est simplement héritée des démarches d’User Experience mises en place dans bon nombre d’entreprises depuis quelques années. Elle vise à s’assurer de l’unification de la prise de contact ou de la conversation, dans le temps et sur ces différents canaux. Comment procéder ? Pour ne conserver que les principes de bases, on considérera 3 étapes dans la conception du parcours :

  1. Identifier les grandes étapes de la relation client. C’est en général assez simple. Par exemple, dans le cadre d’un achat en ligne, on distingue en général 5 grandes étapes dans le comportement du client : la recherche d’idée, la sélection des produits, la réassurance sur des critères objectifs ou sur l’avis de pairs, la recherche du meilleur prix et enfin l’achat final.
    Bien entendu, l’importance et la durée de ces étapes et toute relative, et dépend souvent de l’importance – émotionnelle et financière – de l’investissement. Le besoin de réassurance est très faible lorsque l’on commande un livre sur Amazon (l’achat est souvent peu onéreux et la fiabilité d’Amazon rarement en cause). Il est en revanche très important lorsque l’on recherche un hôtel pour ses vacances (budget important, et besoin de confronter sa recherche aux avis des autres clients).
  2. Trouver les points de contact qui correspondent à ces étapes. Les grandes étapes définies, il convient d’identifier les moyens que le consommateur va utiliser pour réaliser celles-ci. La connaissance de sa clientèle, ainsi que le recours à des études tierces sont alors les meilleurs alliés. Tous les canaux peuvent potentiellement être abordés, qu’ils s’agissent d’interactions digitales pures (Google, comparateurs de prix, site d’avis…) ou d’exposition à des médias plus traditionnels (consultation de magazines, de presse, exposition à un affichage urbain…).
    L’idée de cette étape est d’identifier l’ensemble des temps et des endroits où une interaction entre la marque à promouvoir et le consommateur est possible.
  3. Construire la réponse de la marque sur ces canaux. Étapes et points de contact identifiés, il faut désormais définir comment la marque va assurer sa présence et répondre aux attentes du consommateur. Est-ce un partenariat, une interaction publicitaire, la mise en place d’une nouvelle plateforme de communication (espace social, chatbot…) ou simplement une non-réponse sur certains canaux car jugés non-pertinents ?
    Dans l’idéal, dans cette étape du travail de l’Experience Map, il faudra considérer non seulement les moyens mis en avant par la marque, mais également la teneur de ses propos et l’objectif poursuivi dans cette prise de parole : cherche-t-on de la considération ou les revenus directs ?

Etapes, points de contact et scénario de réponse. En utilisant cette démarche simple, on peut déjà s’assurer que la marque que l’on doit promouvoir la promotion est présente aux bons endroits, avec une réponse adaptée à la problématique du consommateur à un moment donné. Mais cela ne suffit pas toujours à fournir la meilleure réponse dans tous les cas. Pour cela, il faudra encore être certain d’éviter les ruptures dans la relation client et de personnaliser au mieux chacune des prises de parole. Mais ça, on en parlera la prochaine fois !

Et pour continuer à s’inspirer…