Il en est des expériences utilisateurs comme des belles romances au cinéma : elles évoluent en fonction des engagements et des ruptures.
Une rupture, c’est toujours un moment difficile.
Qu’appelle-t-on une rupture quand on parle d’Expérience Utilisateur ? Une rupture, c’est une action qui oblige l’utilisateur à attendre, à changer de moyen d’interaction, ou à réfléchir d’une manière différente lors d’un parcours…
Quelques exemples ?
Ils sont nombreux, et n’importe qui utilisant le Net au quotidien les aura rencontrés au moins une fois. Au moment du paiement d’une commande en ligne par exemple, c’est le fait de devoir rechercher le numéro de sa carte de paiement, ou de devoir trouver son smartphone pour vérifier un numéro de validation 3DSecure. Cela peut également être l’obligation de télécharger une application pour finaliser une action sur son téléphone mobile, ou encore le fait de devoir activer un lien reçu par email lors de la création d’un compte sur un nouvel outil.
Toutes ces actions obligent à « rompre » la logique de nos actions, soit physiquement – lâcher son ordinateur pour regarder son smartphone – soit applicativement – passer d’une application à sa messagerie.
Nous sommes aujourd’hui entourés d’outils et d’interfaces qui nous promettent des interactions fluides et rapides avec les plateformes numériques.
Poster une photo sur Instagram ne demande pas plus d’une minute au commun des mortels. Commander un nouveau livre sur Amazon ne demande souvent qu’un ou deux clics. Ces applications sont étudiées pour limiter les ruptures et proposer une expérience la plus unifiée possible aux utilisateurs.
Sur Amazon par exemple, les étapes sont simples et facilement compréhensibles : panier, livraison, paiement. Amazon stocke vos informations de carte bancaire pour que vous n’ayez pas à chercher de coordonnées de paiement. Autant d‘astuces qui permettent de limiter les ruptures, et également minimiser l’importance des étapes que vous allez franchir avant la commande.
Bien entendu, les ruptures sont quelque fois indispensables, ou inévitables. Pour des raisons de sécurité par exemple – oui, un mail ou un SMS de confirmation d’inscription est un moyen sûr d’éviter une usurpation – ou pour signifier que l’étape qui va suivre constitue un engagement important pour l’utilisateur.
Un engagement, c’est quelque chose à prendre au sérieux
Les engagements, justement. Ce sont ces actions qui ne sont pas anodines pour l’utilisateur parce qu’elles lui demandent plus qu’un simple clic. Laisser des coordonnées personnelles est un engagement. Payer ou envoyer des documents administratifs est un engagement. Signer « administrativement » une déclaration est un engagement.
Ces actions particulières, car elles peuvent avoir un impact sur la vie réelle de l’internaute, sont en général des sources de ralentissement, voire de rupture, dans les parcours digitaux.
C’est en effet dans ces moments que l’internaute pèse la valeur du service qu’il va souscrire, ou de la commande qu’il va effectuer. Cet objet vaut-il réellement le prix demandé ? Ce service m’est-il réellement indispensable et nécessite-t-il vraiment que je lui fournisse mon numéro de mobile ?
Il n’est pas question ici de minimiser l’engagement nécessaire d’un internaute. De nombreux engagements sont rendus indispensables par des contraintes légales, comme les justificatifs administratifs, ou par le bon fonctionnement d’un service, comme les adresses de contact ou la nécessité de pouvoir appeler le souscripteur. Les engagements sont des étapes indispensables à tout service digital, mais ils doivent être présentés de manière claire et compréhensible pour les internautes.
Il y a en fait deux écueils dans la mise en scène des engagements dans les interfaces digitales :
- Le premier, c’est le « Pourquoi ? ». Il est toujours gênant que l’internaute ne comprenne pas l’utilité de telle ou telle information pour un service. Pourquoi par exemple une application météo demanderait à connaître votre adresse email ? Il est important de justifier en quoi cette donnée sera importante non seulement pour le service, mais également pour le bénéfice de l’expérience utilisateur. Depuis le 25 mai dernier et l’application de la directive RGPD, c’est d’ailleurs indispensable.
- Le second écueil, c’est le « Ça vaut vraiment le coup ? », en fait un décalage entre l’expérience promise ou vécue par l’internaute et la valeur de l’information qu’on lui demande. C’est un général une question de perception, mais cela peut également être une question de timing : demander les coordonnées téléphoniques d’un prospect alors que celui-ci n’a pas encore eu l’occasion de comprendre à quoi sert votre outil est la plus sûre façon de le faire fuir. Toute information personnelle a une valeur, même fictive, à vous de fournir à votre contact une expérience qui a la même valeur à ses yeux.
La confiance, ça se construit
Car tout est question de valeur… ou plutôt de confiance. La gestion des engagements et des ruptures revient, en expérience utilisateur, à une gestion de la confiance. A chaque fois que vous demandez à vos visiteurs de passer par une rupture – changement de plateforme, interfaçage avec un autre support – ou de s’engager – renseignement des données personnelles – vous devez lui démontrer qu’il peut faire confiance à votre plateforme.
Une confiance non seulement sur la façon dont vous allez traiter les informations qu’il vous confie. Les internautes sont de plus en plus soucieux de l’usage fait des données personnelles, et la législation RGPD – passée par là en mai 2018 – rend l’entreprise d’autant plus responsable du traitement de ses données.
Mais une confiance également en l’intérêt que va représenter votre outil, votre plateforme, votre service pour lui… et sur le fait que le temps qu’il consacre aux interactions a été bien investi.
La confiance est au final l’un des grands défis de l’UX.